Un tour du monde des énergies

Quand quatre jeunes ingénieurs passionnés de physique et de géo-politique se rencontrent, de quoi parlent-ils ? Des enjeux technologiques majeurs qui pèsent sur notre avenir, et en particulier, des énergies. Il faut dire que Blandine (sur la photo) a choisi à la fin de ses études à l'Ecole polytechnique de se spécialiser en génie nucléaire à l'université de Berkeley. Elodie, autre polytechnicienne, vient de terminer sa scolarité entre l'Institut français du pétrole et la Colorado school of Mines. Riaz, natif de la Réunion et spécialiste de l'océan Indien, ancien élève de l'Ecole navale, est un officier de marine particulier puisqu'il a effectué un stage chez un trader de quotas d'émissions. Quant à Christophe, le mari de Blandine, il achève ses études à l'Ecole nationale supérieure d'électricité par une thèse en microélectronique à la célèbre université de Stanford.

Les quatre amis avaient donc plus de compétences qu'il n'en fallait pour agir. Il y a quelques mois, ils décident donc de créer leur association, Prométhée, pour sensibiliser et expliquer au grand public les enjeux énergétiques, mais aussi pour faire connaître les diverses solutions en matière de production d'énergie et éclairer les choix. Au fait, vous vous souvenez de Prométhée ? Dans la mythologie grecque, il est ce titan qui dérobe le feu détenu par les dieux. "Nous croyons en effet qu'il est important que chacun ait les moyens de construire son opinion et devienne, à sa façon, un Prométhée gravissant les pentes du mont Olympe pour s'emparer du feu de la connaissance qui éclairera ses choix." expliquent les quatre mousquetaires des énergies.

Premier volet du projet, l'équipe de Prométhée et une dizaine de jeunes ingénieurs séduits par cette aventure, ont conçu un kit pédagogique pour les classes de CM1-CM2 : dessins d'humour, petites expériences, comparaisons, explications magnifiquement vulgarisées... Les maîtres n'ont plus qu'à utiliser ce matériel comme ils le souhaitent en classe pour faire découvrir aux élèves les différentes facettes de la question, de l'électricité au climat, en passant par les énergies renouvelables, le nucléaire, les rayonnements solaires, etc. Pour faire concret, l'équipe teste son kit dans sept écoles françaises situées... dans le monde entier : de la région parisienne à Tokyo, en passant par les Pyrenées-Atlantiques et l'île de la Réunion. A terme, l'objectif est de proposer le kit après retour d'expérience, sinon aux dieux de l'Olympe, du moins à l'Education nationale elle-même.

Deuxième étage de la fusée, un tour du monde pour enquêter sur tout ce qui se fait d'innovant en matière de production et de consommation d'énergie tout autour de la planète. Le 29 janvier, Blandine et Elodie se sont donc envolées pour la Norvège. Aussitôt arrivées, elles participaient à un séminaire à l’Institut de physique et technologie de l’université de Bergen sur le projet PEACE (Project of Energy Amplifier for a Clean Environment), un projet d'amplificateur d'énergie nucléaire (pour les spécialistes : un réacteur sous-critique au thorium alimenté en neutrons par une source de spallation couplée à un accélérateur de particules !). Cet amplificateur d’énergie est né de la créativité de Carlo Rubbia, chercheur et prix Nobel de physique. Entre physiciens, on se comprend et les deux jeunes femmes ingénieurs ont passé des heures en passionnantes discussions de spécialistes.

Aussitôt finie la Norvège (où Blandine et Elodie se sont aussi entretenues avec des spécialistes de séquestration de CO2, de fabrication d'hydrogène, de production de pétrole, et de conception d'une usine marémotrice sous-marine), direction l'Espagne, à Barcelone et Madrid. Puis de février à avril, les ingénieurs-reporters seront au Maroc (pour un projet d'électrification par le solaire), en Afrique du sud (à la première raffinerie transformant le charbon en dérivés pétroliers), ou au Kenya où l'ONU cherche à développer les biocarburants, et des fours à bois plus efficaces pour les populations les plus pauvres. Sans parler des nombreuses visites aux divers instituts spécialisés et à leurs nombreux experts en fission nucléaire, hydrocarbures, cellules photovoltaïques, etc, etc.
Passionnant tour du monde à la fois technologique, mais aussi environnemental, économique et humain. En se rendant ainsi sur le terrain aux quatre coins de la planète, les globe-trotter-ingénieurs ont en effet l'immense avantage de ne pas rester dans les centres de recherche, mais de découvrir aussi de nombreuses réalisations, et de confronter toutes les options technologiques aux difficultés de transport et de circulation des mégalopoles, aux problèmes de développement des populations rurales, à l'isolement des régions enclavées, aux conséquences du réchauffement climatique dans l'environnement de nombreuses régions, etc. Une espèce de grand voyage scientifique que tout le monde peut suivre sur leur blog-carnet de voyage sur le site de l'association qui doit répertorier toutes les initiatives.
Le tour du monde des énergies s'achèvera le 29 août 2007, mais son exploitation se poursuivra à travers un livre, de nombreuses retombées attendues dans la presse, et un partenariat déjà engagé avec l'Agence française du développement. L'énergie, en tout cas, les membres de Prométhée n'en manquent pas, et c'est peut-être déjà la première raison d'espérer en l'avenir.