Réforme du bac : le gouvernement ira-t-il assez loin ?



Emmanuel Macron dit vouloir réformer le bac, mais aussi l'entrée dans le supérieur. La réforme annoncée se fera-t-elle et ira-t-elle assez loin pour rectifier les défauts du système de formation français, toujours très pyramidal ?





C'était l'une des propositions pour l'éducation d'Emmanuel Macron lors de la campagne présidentielle. Le dossier est désormais sur le bureau du nouveau ministre de l'Education Jean-Michel Blanquer et aussi sur celui de Frédérique Vidal, en charge du porte-feuille de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Réformer le bac pour le réduire à 4 épreuves à passer, les autres matières étant prises en compte par le contrôle continu. A vrai dire, il y a des années que l'on évoque la nécessité d'alléger l'examen, dont le coût s'élève à 1,5 milliard d'euros par an, soit 2,2% du budget de l'Education nationale. Une véritable usine à gaz qui connait chaque année ses couacs... tout cela pour décerner un diplôme dont la valeur ne cesse de pâlir.

Les lycéens qui s'apprêtent à plancher pour le bac 2017 seront donc peut-être les derniers à sacrifier au rituel français de ce grand examen final.

Les chiffres du baccalauréat 2017

- 718 890 candidats, dont 53% en séries générales, 19% en séries technologiques, 28% en bacs professionnels. Des effectifs globaux en hausse de 3,34% par rapport à 2016
- 4 411 centres d'examen
- Environ 4 millions de copies à corriger
- 2 900 sujets d'examen
- 170 000 correcteurs et examinateurs
- 80 euros par candidat (coût de la session 2016)

Une réforme, pour quoi faire ?

Mais si la limitation du nombre d'épreuves parait une bonne idée, elle est loin de répondre à toutes les questions. "Le risque serait de s'en tenir à une réforme des modalités d'organisation de l'examen, alors qu'il faut assumer une réflexion globale sur le système éducatif", souligne Marc Vannesson, délégué général du groupe de réflexion Vers le haut, qui vient de publier une note sur la réforme du bac.

Certes, le gouvernement a redit son intention de réformer la procédure d'entrée à l'université en instituant des "prérequis" par formation, tandis que tout bachelier peut aujourd'hui s'inscrire dans toute filière universitaire (sous réserve qu'il y ait assez de places).

"Je pense qu'il faut qu'on retrouve l'utilité profonde du baccalauréat, qui est non pas d'être une forme d'évaluation finale de l'élève, mais (...) un tremplin pour la suite de son parcours", a déclaré de son côté Jean-Michel Blanquer sur France Culture le 4 juin dernier.

Choisir ses matières de bac en fonction de son projet d'étude ?

Un des projets serait de laisser le lycéen choisir ses matières de bac, en fonction des études qu'il souhaiterait étudier dans le supérieur. Un dispositif qui rappelle le système anglais des A-levels : en Year 12 (équivalent de la première), l'élève choisit 4 à 5 matières à étudier, avec un choix très large. En Year 13, il en garde 3 ou 4 pour les présenter à l'examen. Et la note obtenue au A-Level (de A à E) dans chacune d'elle lui permet de postuler à l'université.

Cette liberté de choix a le mérite de donner du sens à la fin des études secondaires et d'inciter l'élève à bâtir un projet. Certes, dans ce système, il faut conquérir sa poursuite d'études, et non l'exercer comme un "droit". Se responsabiliser et se confronter rapidement au verdict du réel, plutôt que de repousser l'échec à l'après-bac.

D'un système pyramidal à un système en étoile

Mais avec le système des "prérequis", forme de sélection pour l'entrée à l'université, que deviendraient ceux qui n'auraient pas ces prérequis ou ne seraient plus admis à l'université ? "A cette question, le gouvernement ne semble pas encore apporter de réponses, souligne le Think Tank Vers le Haut, alors même que c'est un enjeu crucial pour une réforme équilibrée, qui profite à tous les jeunes.

Le groupe de réflexion préconise donc la création de filières professionnelles d'excellence, et surtout, la fin du système pyramidal qui réserve les emplois les plus qualifiés aux diplômés des études longues et générales. A ce système pyramidal, il faudrait substituer un "système en étoile" prenant mieux en compte les compétences de chacun.

Et si on supprimait le bac général ?

Au passage, il glisse quelques propositions décoiffantes, comme la suppression du bac général - l'une des clés de voûte de la pyramide - et des séries de bac qui classent et pré-orientent, ou la mise en place en entreprise de programmes "Haut Potentiels" pour les jeunes qui seraient recrutés après une formation courte.

Car si l'université n'est plus l'unique voie de l'ascension sociale, les entreprises pourraient prendre le relais. N'est-ce pas ce que l'Allemagne réussit parfaitement : de l'autre côté du Rhin, seulement 44% des élèves accèdent au baccalauréat... mais tous les autres s'insèrent parfaitement grâce à d'excellentes filières professionnelles. Et le taux de chômage est au plus bas.

Pour en savoir plus

Une note de décryptage sur la réforme du bac

"A l'origine, explique "Vers le Haut" dans sa note de décryptage (à télécharger ci-dessous), le bac servait d'examen d'entrée dans le supérieur." Mais à l'époque, il n'y avait que quelques dizaines de milliers de bacheliers, fruit d'une sélection pyramidale. Et ceux qui n'avaient pas le bac, largement plus nombreux, s'inséraient parfaitement grâce à la formation professionnelle.

La massification du nombre de bacheliers aurait donc dû conduire à une refonte de tout le système... Or, "au lieu de cela, indique la note, on a gardé le système ancien, avec comme critère de réussite, la poursuite d'études longues, sans trop prendre en considération les élèves qui avaient d'autres talents à faire valoir... Le déploiement des formations professionnelles est apparu comme un pis-aller. Les employeurs ont été progressivement mis sur la touche et se sont déchargés de leur responsabilité éducative."

- Rens. : verslehaut.org




Rédigé par le Mercredi 14 Juin 2017

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