Relation aux autres : bas les masques, soyons vrais !



Les relations humaines vraies donnent de la densité à la vie, elles sont une des clés du bonheur. Mais comment communiquer en respectant les autres et en osant dire "je" ? Quelques pistes à travers les principes de la "communication non violente".




"Tu viens dîner chez moi ce week-end ?", "Désolée, j’ai pas le temps… ", Vraiment ? Sincèrement ? Parfois, il serait plus simple – et plus vrai – d’avouer ma fatigue, ma charge de travail, mon besoin de calme…

Pourquoi ne pas exprimer simplement ce qui est en moi ? Est-ce que, pour moi, c'est impossible ? Pas de dialogue sans sincérité, mais comment y parvenir…

Apprendre à écouter

Ce qui semble si simple ne l’est pas tant. Il m’arrive si souvent de préparer ma réponse pendant que mon interlocuteur parle, de disposer d’une solution toute faite, de dévier la conversation pour raconter une expérience personnelle :

- Ma grand-mère va mal, je suis très inquiète…
- Ah oui ? Bah, la mienne aussi, l’année dernière… D’ailleurs, je te conseille…


Je refais parfois l’histoire, ou la déforme, et passe à côté de confidences de mes amis, de mon conjoint, de mes enfants. Je suis si pressé, ou préoccupé par mes propres problèmes... ou conditionné par mes peurs.

Comment écouter vraiment, alors ? Un bon test : suis-je capable de reformuler ce que la personne en face de moi vient de me dire, sans interpréter ou tronquer ses paroles ? L’empathie, c’est d’abord l’écoute : comprendre plus qu’agir, l’un des piliers de la Communication non violente (CNV).

Dans son ouvrage Cessez d’être gentils, soyez vrais , Thomas d’Ansembourg illustre un dialogue inspiré par la CNV : une petite fille laissée à la crèche reste inconsolable. Une des assistantes s’approche d’elle :

- Tu es très triste, Emma ?
- Oui, répond la petite en sanglotant.
- Tu es fâchée, aussi, non ?
- Oui, dit-elle en reniflant.
- Tu aurais voulu rester avec ta maman, ce matin ?
- Oui, soupire-t’elle…


L’assistante, assise à côté d’elle, soupire aussi, la regarde avec compassion, puis lui propose :

- Et maintenant, tu veux venir jouer avec moi ?
- D’accord, s’exclame Emma
, soulagée d’avoir été rejointe et comprise.

J'arrête de communiquer quand je me protège des relations directes en portant un casque sur les oreilles, en entretenant des conversations parfois superficielles avec un réseau de personnes plus ou moins connues, et surtout quand je ne vois plus l’ami, le conjoint ou l’enfant triste, à mes côtés, qui aurait besoin de cinq minutes d’une attention pleine pour retrouver un sourire... Juste une oreille… sans conseil, sans aide… juste un moment où je serais tout à lui, où ses sentiments et besoins seraient entendus à 100% ! C'est presque trop simple...

Des relations de qualité

"Les personnes qui dégagent un bien-être profond, une joie d’être au monde, sont celles qui privilégient non pas la multiplication des activités, des possessions, des rencontres, mais la qualité de la relation qu’elles entretiennent avec les êtres, les objets et les choses à faire, en commençant par la qualité de la relation qu’elles entretiennent avec elles-mêmes", affirme encore Thomas d’Ansembourg.

Le médecin et académicien Jean Bernard parlait justement "d’ajouter de la vie aux jours lorsqu'on ne peut plus ajouter de jours à la vie", phrase que reprend Anne-Dauphine Julliand pour parler de sa bataille au côté de sa fille malade... Je peux vouloir "vivre plus"… Pourquoi attendre que mes jours ou ceux de mes proches soient comptés ? Ils sont tous précieux !

Commencer par reconnaître mes propres besoins

Commencer par moi-même est essentiel … Petite check-list de ma situation :

- Est-ce que je sais reconnaître mes sentiments et mes besoins, ne pas vivre "dans ma tête" uniquement, déconnecté de ce qui est vivant en moi ?
- Ai-je l’habitude de toujours demander aux autres ce qu’ils veulent faire, ou ce qu’il "faut" faire ? Ou, au contraire, est-ce que je prends le risque de ne pas agir "comme tout le monde" et de dire : j’aime / je n’aime pas… je veux / je ne veux pas… en interrogeant mes propres valeurs, ma conscience, mon cœur et mon corps ?
- Est-ce que je sais m’arrêter pour "m’entendre": émerveillé, joyeux, paisible… ou choqué, démoralisé, en colère ?
- Quels besoins sont satisfaits ou insatisfaits à ce moment précis ? Ai-je conscience de mes besoins de repos, de sécurité, d’indépendance, d’affection, de présence, d’estime de soi, d’orientation, d’apprentissage, d’amour ou d’amitié, de confiance, d’expression, de reconnaissance, de respect, d’ouverture, de beauté... (la liste pourrait s'allonger !) ? La CNV propose d’ailleurs des répertoires de sentiments et de besoins pour nous aider à les nommer précisément !

Savoir les dire aux autres simplement

J’ai peut-être tendance à attendre des autres qu’ils devinent mes problèmes, attentes, besoins, au lieu de les expliciter clairement. J’ai peut-être appris qu’il ne faut pas s’écouter, que c’est de l’égoïsme, de l’individualisme de parler de soi.

Mais comment espérer que mes sentiments soient compris, mes besoins reconnus, si je ne dis pas aux autres clairement ce que je ressens ? Me respecter, c’est aussi me dire en vérité, et en exprimant mes besoins de façon paisible, j’aide aussi l’autre à les respecter. C’est en me connectant ainsi à ce qui est "vivant"en moi et en l’autre que j’entretiens la joie de la rencontre. Petit exercice pratique :

- Dis, Antoine, je suis de passage par chez toi… tu m’accueillerais bien pour une nuit ?
- Mais bien sûr !


Et Patrick débarque chez moi, et nous refaisons le monde jusqu’à minuit… Pourtant, quelle difficulté pour me concentrer ! Je suis déjà fatigué, je me souviens que je pars en voyage dans deux jours, que ma valise n’est pas commencée… Reprenons donc la conversation :

- Dis, Antoine, je suis de passage par chez toi… tu m’accueillerais bien pour une nuit ?
- Je vois que cela te fait très plaisir de venir chez moi, en plus de te rendre service
(1ère étape : observation de la situation).
- Je suis très content de te revoir et en même temps je me sens fatigué, j’ai un voyage prévu dans deux jours et j’ai peur de ne pas trouver le temps de boucler ma valise (2e étape : sentiments éveillés par cette situation).
- J’ai besoin de passer un moment tranquille avec toi pour parler de tant de choses, mais ce soir je ne pourrais pas être attentif, j’ai vraiment besoin de me reposer et d’être rassuré que tout sera prêt à temps (3e étape : besoins à l’origine de mes émotions / sentiments).
- Je t'accueille avec joie pour la nuit, mais es-tu d’accord pour que nous attendions mon retour pour discuter tranquillement ? (4e étape : action pour améliorer mon bien-être).

Dialoguer pour éviter les conflits

Ces 4 étapes de la CNV, observation-sentiments-besoins-demande (OSBD) peuvent s’appliquer à la plupart de nos relations quotidiennes, et aux moments de tensions en particulier. Face à mon voisin qui écrase chaque jour mes fleurs en se garant, plutôt que de m’énerver sans rien dire et de lui faire la tête, je peux analyser calmement la situation, entamer le dialogue en restant attentifs à mes propres réactions et aux siennes :

1 – Quel événement me donne envie de m’exprimer ? Le décrire objectivement : ce que j’observe, entends...
Quand je te vois garer ta voiture dans mon jardin…
2 – Quelles émotions, sentiments sont éveillés en moi ?
…j’ai peur pour mes fleurs et je me sens en colère…
3 – Quels besoins sont à l’origine de ces émotions ?
…parce que j’ai besoin que mon travail et mon espace personnel soient respectés.
4 – Exprimer ou entendre clairement une demande : que faire pour améliorer mon bien-être ou le sien ?
Serais-tu d’accord pour te garer uniquement sur les graviers ou dans le parking d’à côté ?

Entrer dans une culture de paix

Il s’agit d’aller vers l’autre sans jugement, entrant ainsi dans une culture de paix. On ne peut certes pas toujours suivre le schéma "OSBD" à la lettre (!), mais c’est l’esprit qui importe !

Me respecter, respecter les autres, apprendre à mieux écouter, à mieux me faire entendre… La CNV me permet de grandir dans la confiance en moi et de porter un regard positif et bienveillant sur les autres. Je sors ainsi de la frustration de ne pas arriver à me dire vraiment, de ne pas rejoindre l’autre dans ce qu’il vit lui aussi vraiment.

Le dialogue commence, un échange sincère et vivant qui permet de résoudre sereinement les conflits. Pour Thomas d’Ansembourg, cette méthode a été un nouveau départ : après avoir exercé 15 ans comme avocat, avide de sens, il s’est occupé de jeunes en difficulté… pour s’y sentir renvoyé à lui-même : "Aide-toi toi-même !", semblait lui dire ces jeunes…
Après 6 ans de thérapie et la découverte de la CNV avec son fondateur, Marshall Rosenberg, il s’est lancé dans l’animation de conférences et d’ateliers, et … Un exemple qui peut nous inspirer !

Pour en savoir plus

  • Cessez d’être gentils, soyez vrais : être avec les autres en restant soi-même. Thomas d’Ansembourg. Montréal, Les éditions de l’homme, 2001.
  • Thomas d’Ansembourg a fondé l’association Cœur.Com avec Guy Cormeau
  • Site francophone de la CNV
  • Wiki de la CNV
 
  • Lire aussi :
Savez-vous écouter les autres ?
Être authentique dans sa relation aux autres
Savoir dire non

Mardi 14 Mai 2019

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