Foot, samba, plage, carnaval, favelas... et après ?
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Jérémie Loevenbruck
Jérémie Loevenbruck

J'ai eu la chance d'effectuer le dernier semestre de mes études d'ingénieur à Rio de Janeiro, au Brésil... Ce blog est la publication hebdomadaire des quelques lignes que j'avais tentés d'écrire entre juillet et décembre 2009.... Elles retracent ces



Je publie environ un nouvelle article par semaine ! N'hésitez pas à commenter et/ou à me contacter pour des infos...



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les contrastes saisissants


Rio : blanc ou noir !
Vous en avez déjà eu un petit aperçu plus haut, mais déjà avec ces 3 mois de recul, le brésil, et particulièrement Rio, me parait plus un lieu de vacance, de dépaysement, de ressourcement, qu’un lieu de résidence...

Il faut voir les « anciens» assis aux terrasses des café, en bas des escaliers où j’habite, une guitare a la main, et sa chante, et sa chante, et tout le monde chante. Il faut les voire danser le samba, le forro... Tous connaissent ... Il faut les voir profiter de la plage (et quelles plages !!) dès qu’un rayon de soleil apparait entre les nombreux nuages et averses. Il faut les voir t’aborder avec un large sourire alors qu’ils ne te connaissent ni d’Eve ni d’Aden, parler à longueur de journée avec n’importe qui de n’importe quoi, toujours « pronto » sur les « brincaderas » (blagues). Il faut voir ces 20 degrés garantis toute l’année, à rio, et les bientôt 40 qui commencent à s’installer...

Rio : blanc ou noir !
Il faut tous simplement s’arrêter 10 min à ipanema le dimanche, jour de soleil, armé de son Antartika (la bière locale), sous son parasol et se sentir au paradis...

Mais il faut aussi voir ces brésiliens, à la nuit tombé, qui se retourne dans la rue toute les 30 secondes, qui ont peur, qui vont travailler comme les parisiens en tirant la mine, qui parfois te vendent du pain, comme les parisien, en te dévisagent l’air de dire « casse toi de mon pays pauv’ gringo »... Il faut voir ces enfants dans la rue, shooter au crack, ces favelas malsaines ou 20 % de la population s’entasse, ces 6 000 morts par balle, par an, dans l’état de Rio... Il faut voir les hopitaux publiques délabrés...

Plus concrètement, il faut les supporter systématiquement en retard, ou lorsqu‘ils ne viennent pas au rendez vous, et le tout sans prévenir (ceux qui ne sont pas sujet à ça, par contre, on peut vraiment compter sur eux !) ... Il faut voir qu’on ne peut pas leur faire confiance, que leur manque de rigueur et d‘exigence nuit a la qualité du moindre travail. Il faut voir comment les mecs se comportent en soirée, en assaillant les filles plus qu’en les draguant…

Bref, plein de petites choses qui me font dire que ce pays, en l’état, n’est pas forcément l’endroit rêver pour vivre. Bien sur, on peut s’isoler, comme beaucoup le font, dans ces sphères de riches. La zona sul et ses Leblon, Lagoa ou São Conrado est un exemple. Mais cela me parait malsain de vivre dans ces conditions à coté de la misère à laquelle on est forcément confronté, tous les jours.

On pourrait avoir envie de tout changer, de tout révolutionner, de travailler contre tous ces maux qui empêchent tellement de personne de vivre heureux. Ca oui, faire de la politique ici pourrait m’aller. Mais je ne suis pas brésilien.

Je pourrais avoir envie d’y faire de l’humanitaire, mais ce manque d’exigence me dérangerait. Le président d’une des plus grandes associations cariocas d’aide au développement des favelas c’est fait assassiner il y a deux semaines pour une paire de chaussure et une veste usée. Les 2 policiers qui arrivèrent quelques instants plus tard sur place, rapidement alerté par les coups de feu, ont préféré s’approprier les objets volés, et laisser partir les meurtriers. S’ils avaient secouru la personne agonisante, elle serait à ce jour vivante...

Bref de l’humanitaire au milieu de la violence, avec un pays qui n’a pas encore (ça va venir) le système politique sein qui permettrait un développement plus stable, ça ressemble à un coup d’épé dans l’eau.

On peut voir l’humanitaire comme ceux qui pansent les plaies, ceux qui sont là pour faire le travail que l’état ne peut ou veut pas faire. Sébastien et Mathilde, par exemple, sont dans ce cas là à Salvador. Ils me racontaient leur sensation de voir que leur action paraissait si ridicule face aux problèmes rencontrés. On apprend alors l’humilité. La somme de ces petits riens feront peut être qu’une personne réussira à se sortir de cet enfer... Même si j’admire 1000 fois cette façon de se mettre au service des autres, gratuitement, sans attendre la révolution rêvée, ma jeunesse et mon caractère me pousserait à travailler sur le fond des problèmes. Et seule la politique peut y remédier.

Ma vie de local

En soirée, le carioca est surement la personne la plus heureuse au monde ! Et il y en a des soirées ! Le carioca, de n’importe quel âge, vie dans la rue, aux terrasses des botequims, mange à la lanchonette, va à la plage, au cinéma, au shopping, cour dans les parcs… C’est culturel, de n’importe quelle classe sociale, de n’importe quel âge. C’est ma vie de tous les jours.

J’ai l’impression de vivre tellement de choses, mais bien plus tranquillement qu’en France où tout était à 200 à l’heure. Je viens de passer une semaine sans téléphone, donc sans montre, sans réveil, et ça ne m’a pas plus dérangé que ça.

Rien que de vivre au jour le jour comme un carioca, j’ai l’impression de découvrir de nouvelles choses. Je vais manger une fois par jour dans ma botequim à 5 reais l’assiette (gigantesque, et presque aussi bon marché qu’un plat fait à la maison), j’achète le journal au kiosque, je vais courir sur la plage et dans le parc de Flamengo (la classe), je prends le bus 2h par jours…

J’ai besoin de quelque chose : je flane à Lapa, au centro, au marché d’uruguaiana (ça c’est un vrai souk !) Le commerce y est dur. Au bout d’une semaine à cherche un télephone d’occasion, j’ai quand même trouvé une boutique (plutôt ce qui ressemble à un stand), sympa, où les gens étaient accueillant, les clients racontaient des blagues, les prix m’allaient… Moi qui désespérait à trouver « le » commerce où l’on ne m’agressait pas, où je me sentais à l’aise, sans cette impression d’être extorqué. Celui-ci m’a donné envie d’acheter. J’y ai finalement trouvé ce portable miteux, vraiment pas cher, que je pourrais et me ferai voler 30 fois. A 30 reais ils peuvent venir me le prendre….

Le coup de ne pas s’attacher aux choses matérielles reste quand même la meilleure solution pour se prémunir du vol !

Dès le début, on découvrir l’omniprésence du marché noir, de la négociation. Avec mon teint bronzé et mes vêtement carioca, je passe inaperçu dans la foule. Mais dès que je parle, hop c’est fini : classé touriste ! Et les prix doubles ou triples comme par enchantement.

A force je connais les justes prix et me fait à chaque fois le plaisir de le rétablir, devant le commerçant. Mais à la longue c’est énervant. Au-delà d’être fichier de billets de dollars sur pâte, ces commerçants nous « prennent pour des cons ». Quel manque d’esprit commercial ! Est-ce généralisé dans tous les pays du monde… ?

L’avantage du marché noir, c’est qu’on peut tout avoir en un clin d’œil. C’est aussi le moyen pour les plus pauvres de survivre. Je me demande l’impact de ce marché sur les chiffres officiels donnés dans tous les domaines. La police ferme clairement les yeux sur une grande partie de ce commerce.

Ici, même s’il doit exister des règles, on peut tout à fait se mettre à vendre dans la rue ce que l’on veut… Mehdi me racontait l’histoire d’un des ses voisins qui, du jour au lendemain, s’est mis à vendre des salades de fruits devant le shopping le plus classe de Rio… Ça marche !

De même, je discutais, lors d’une de ces interminables attentes, avec cette petite dame qui vend des bières en bas de chez moi. Elle achète 2 packs de bières et des glaçons au commerce d’à coté (si elle faisait 200 m de plus elle économiserait 10c par canette), met le tout dans sa glacière en polystyrène (omniprésentes), et vend ces « cervejas estupidamente geladas » aux fêtards de passage.

Ça ne lui rapporte pas grande chose, mais suffisamment pour manger, et je pense pour quelques extras sous forme de crack ou autre cachaça (son regard fait peur à voir). Elle vit dans la rue car elle n’arrive pas a gagner les 250 reais nécessaires pour le moindre logement dans le quartier. A titre de comparaison, une maison de 3 pièces à Niteroi dans un condominio tranquille, sommaire mais vivable, c’est 450 reais. Et c’est encore 3 fois moins cher qu’à Ipanema !

Rio : blanc ou noir !
Mes journées, ma semaine

Mon quotidien ? Je commence la semaine comme tout le monde le lundi ! Sauf que je n’ai pas cours. Je reste généralement à Lapa, je fais les courses, la lessive, à manger… J’envoie des mails en France, je rédige par exemple ces quelques lignes. Il m’arrive également de boire un verre tranquille le soir.

Le mardi, j’ai cours à 13h. J’aime bien me lever tôt pour continuer ce que je n’ai pas fini le lundi, ou bien aller à la musculation à la salle de la PUC. Je finis à 15h, et maintenant qu’on est en heure d’été (il ne fait nuit qu’à 19h), je peux allez à la plage, ou bien au rugby à Niteroi.

Le soir est plus ou moins animé. En ce moment c’est soirée gringo (j’y vais rarement)!

Le mercredi rebelote, mais j’ai cette fois cours de 13h à 19h (officiellement). La suite est très aléatoire. Je reprends tranquillement le « beach rugby » sur la plage d’ipanema… On peut conclure la soirée en dansant le forro à Lapa, en buvant quelques garrafas rue farani (l’une des moins cher de Rio) à Botafogo.

Jeudi = mardi. Le soir est cependant bien plus animé (baixo gavéa, lapa…). J’ai malheureusement cours à 7h le vendredi matin, et la présence est importante. Quand je craque et que je décide de ne pas y aller, « je fais pas le voyage à vide » !

Vendredi, on sent le week end arriver, on commence à programmer les soirées, les plages un peu plus loin du centre, les visites, les éventuelles voyages… Le vendredi soir on a toujours le Lapa mythique : la feria hebdomadaire.

Mais le dernier c’est par exemple déroulé au sommet d’une favela sécurisée, dans un bar jazz très classe. Trop classe, la « haute » qui se retrouvait au milieu des pauvres. C’est vrai que la vue en vaut la peine. Avec Mehdi, on est quand même sorti pour allez boire 3 bières (3x moins chère) un peu plus bas.

Samedi et dimanche sont très variables. Les jours de beau temps, la plage reste l’activité favorite, de préférence à l’extérieur de Rio.

Mais je peux également les passer dans mon lit (récup de soirée), ou sous l’une des cascades de la forêt de Tijuca (la plus grande forêt citadine du monde, quelque chose d’hallucinant en plein coeur de Rio), dans les bailes funk ou autres soirée toujours plus originales…

Il m’arrive enfin de dormir, de travailler, et surtout de passer beaucoup de temps dans les petites histoires de la vie de tous les jours...comme tout le monde !

Rio : blanc ou noir !
Les botequim / le Bip Bip

Les botequim, c’est tous ces petits bars, souvent tapissés de faience blanche, que l’on voit à chaque coin de rue. On y discute, autour d’un suco (jus), d’un salgados (gateaux salé), ou d’une cerveja le soir. C’est le rdv populaire, et particulièrement le dimanche. A ipanema, quartier riche, on les retrouve plus classe, mais ça existe. Perso je préfère celles de Lapa, plus gazière...

Une âme éclairée avait donc donné rendez vous a tous les gringos de la PUC pour boire quelques canons pas cher. J’ai suffoqué (pas de chaud) au bout d’une heure et demis et suit parti retrouver ce fameux bip bip, 20 m², mais 20 m² de bonheurs.
arrivé là, un mardi soir, jour habituel de choro (entre la bossa nova et le forro), pas de musique, mais le patron qui discute avec quelques personnes de tout et de rien. Les personnes en l’occurrence étaient parait-il des stars de la bossa…

J’y suis retourné encore ce soir, pour la troisième fois. Et encore une fois du chorro, des gringos (l’étale est dans le routard et le lonely planet) mais cette fois une belle musique Ao vivo (live). Deux francaises qui entament un tour du monde sont venu grâce au brésilien qui les accueillait (version couch surfing). Un autre couple de polonais a coté, et quelques locaux.

Je remarque que les musiciens payent leurs consommations. Il n’y a donc pas ce couvert artistique (sorte de droit d’entrée qui rémunère les musiciens) comme cela se pratique partout ailleurs à Rio. Les guitaristes et autres flutistes ne sont donc là que pour passer du bon temps...

Le retour en bus se passe en compagnie de l’habitué du lieu. Depuis 7 ans, Il y vient tous les jours pour y travailler, ou tout simplement profiter. Il me racontait les 40 ans d’histoire, fêtés il n’y a pas longtemps...

Je découvre ce bar pour la première fois un dimanche soir. A l’interieur de la samba, à extérieure, sous le haut-vent tiré pour se protéger de la pluie, les locaux en train de chanter ou applaudir par des claquements de doigt (les voisins d’au dessus sont dérangés par le bruit). On se demande qui fait quoi, où est le patron ? Ahh ça doit être lui qui fait tout arrêter pour sermonner les 3 gringos faisant du bruit… Le serveur ? pas besoin, on se sert sois-même dans le frigo au font de la salle... La caisse ? C’est le patron qui note (un calepin qui ressemble fortement à mes notes de cours...), on règle sur la terrasse, avant de partir... Quelque chose de magnifique.

Aujourd’hui, ce « surpeuplement » de gringos m’a un peu dérangé. Mais finalement, le propre du touriste, c’est bien de visiter ce qui se fait de mieux… Logique qu’il soit ici. Tant que l’esprit du lieu perdure, pourquoi s’en passer ? Le slogan de l’endroit : « O BipBip, um bar ao servicio da alegria » (un bar au service de la joie) me parait bien résumer cet esprit, celui du brésil tout entier….

Rédigé par Jérémie Loevenbruck le Vendredi 16 Avril 2010 à 20:28 | Commentaires (0)

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