Sélection en master : une aide à la mobilité et un droit au recours ouverts aux étudiants


La mise en place de la sélection à l'entrée en Master 1 oblige des étudiants à changer de région mais les boursiers auront droit à une aide de 1000 euros. Quant aux étudiants non admis, ils peuvent faire valoir leur nouveau "droit à la poursuite d'études".




Pour la ministre de l'Enseignement supérieur Frédérique Vidal, la rentrée universitaire 2017 s'annonce délicate. Non seulement des milliers de bacheliers n'ont pu obtenir de place en licence via le portail APB à cause de l'augmentation des effectifs - ils étaient encore 6 010 le 17 août -  mais il faut aussi gérer la mise en place en 2017-2018 de la sélection en première année de master (M1).

Après d'intenses discussions et négociations entre les universités, le ministère et les syndicats étudiants, le Parlement français a en effet voté fin 2016 une loi autorisant les universités à pratiquer dès 2017 une sélection à l'entrée en master 1, et plus en master 2 comme cela se faisait encore jusque-là dans certaines filières.

Un certain nombre d'étudiants vont donc devoir quitter leur université d'origine pour poursuivre des études en master dans une autre région, et c'est pour les aider que le gouvernement a annoncé le 8 août la mise en place de "l'Aide à la mobilité en Master".

Une aide de 1000 euros réservée aux boursiers

Cette aide est réservée aux étudiants boursiers inscrits en M1 dans une région académique différente de celle dans laquelle ils ont obtenu leur licence. Le montant de cette aide sera de 1 000 euros par étudiant. Pour en bénéficier, les étudiants de licence peuvent déposer leur dossier en ligne à partir du 23 août 2017 sur le site www.messervices.etudiant.gouv.fr

Cette annonce n'est pas une surprise puisque le précédent gouvernement avait évoqué la possibilité d'une aide financière à la mobilité.

La Fage (Fédération des associations générales étudiantes) s'est félicitée de sa mise en place en proposant cependant "d'ouvrir cette aide aux étudiants de classes moyennes n'ayant pas la possibilité d'accéder aux bourses sur critères sociaux". La Fage propose également "d"étendre l'aide à une mobilité intra-académique, comme tenu de la vaste superficie des nouvelles régions académiques".

Il est peu probable que le syndicat obtienne gain de cause, le montant de l'aide à la mobilité étant déjà substantiel. Mais il est clair que le ministère veut donner un signal positif aux étudiants après l'annonce en juillet de la baisse de 5 euros de l'APL, l'une des aides au logement accordées par les Caf.

Plus de 1000 étudiants recalés ont tenté un recours

Page d'accuei du site trouvermonmaster.
Dans la liste des points noirs de la rentrée étudiante, il reste les étudiants recalés n'ayant pas obtenu de place en master 1. La loi voté fin 2016 a prévu qu'ils pourraient exercer un "droit à la poursuite d'étude" et que l'on devra leur proposer trois inscriptions dans un master universitaire en adéquation avec leur projet professionnel. (Lire : Poursuite d'études en master : ce qui change en 2017).

Pour exercer ce droit, les étudiants qui le souhaitent doivent déposer un recours en ligne sur le site trouvermonmaster.gouv.fr et cela dans les 15 jours suivant la dernière réponse négative reçue. A la date du 24 juillet 2017, un peu plus de 1000 étudiants avaient déposé un recours, selon le ministère de l'Enseignement supérieur. Un chiffre relativement modeste à l'échelle des 70 universités françaises, mais qui pourrait encore augmenter jusqu'en septembre.

Les syndicats étudiants soulignent en effet que les étudiants de licence ont été peu informés de l'existence de ce "droit à la poursuite d'étude" et que le formulaire à remplir pour l'exercer est peu intuitif. La Fage réclame donc "des mesures transitoires pour rendre tangible le droit à la poursuite d’études dès cette année."

A fin août, il est encore trop tôt pour savoir si les solutions proposées aux étudiants ayant exercé leur "droit à la poursuite d'étude" seront satisfaisantes. Dans une interview au quotidien Le Monde daté du 3 août 2017, le président de la Conférence des présidents d'université Gilles Roussel affirmait "être en mesure de trouver des solutions pour ces jeunes, même s'il faut attendre septembre pour réaliser un bilan complet".

Le problème des masters de droit et de psycho

Comme pour l'entrée en licence, deux filières semblent faire exception : le droit et la psycho. Normalement, la loi autorisait les universités à ne pas mettre en place la sélection à l'entrée en master 1 à la rentrée universitaire 2017 dans ces disciplines mais à la conserver de façon transitoire à l'entrée en master 2.

Les textes préconisaient de prendre un temps de réflexion afin d'harmoniser le cursus universitaire avec l'entrée dans deux professions réglementées de ces filières : celles d'avocat et de psychologues cliniciens, qui recrutent traditionnellement à bac+4.

Or sur le terrain, il semble que de nombreuses universités aient choisi d'instituer la sélection à l'entrée en M1 dès la rentrée 2017. Plusieurs l'ont mises en place au dernier moment "parce que l'université voisine l'avait fait et qu'ils ne voulaient pas accueillir tous les étudiants", indiquait Gilles Roussel dans l'interview précédemment citée. "Il aurait peut-être fallu une régulation un peu plus forte sur ce point et dans ces disciplines", reconnaît-il.

Le résultat est qu'un grand nombre d'étudiants recalés sont titulaires d'une licence de psycho ou de droit. En psycho, surtout, les "plans B" sont très limités pour les étudiants voulant devenir psychologues cliniciens. L'université Toulouse-Jean-Jaurès, l'une des seules à ne pas avoir introduit de sélection, a été submergée par des milliers de candidatures d'étudiants recalés et contrainte à fermer ses inscriptions.

Recalé en master 1 ? Peut-être un moindre mal...

La situation rappelle un peu l'afflux des candidatures en licence via APB à une différence près : en master, la sélection introduite en début de master 1 a simplement été déplacée puisqu'elle s'effectuait jusque-là en master 2, notamment en droit et en psycho.

Le manque de places dans ces disciplines n'est donc pas nouveau et pour la psychologie, rappelons qu'il est aussi dicté par le petit nombre d'emplois et de débouchés offerts aux psychologues cliniciens. Depuis des années, des milliers de titulaires de masters de psycho sont donc contraints de se réorienter ou de compléter leur formation pour s'insérer sur le marché du travail.

Chaque année aussi, des étudiants ayant obtenu un master 1 se retrouvaient dans l'impossibilité d'aller au bout de leurs études et de décrocher le seul diplôme pouvant valider leur cursus. Beaucoup devaient abandonner leurs études, d'autres choisissant de redoubler pour retenter leur chance l'année suivante.

C'était d'ailleurs un des motifs de la réforme de l'entrée en master : éviter d'engager des étudiants dans des voies sans issue.

Plus facile de se réorienter à bac+3 qu'à bac+4

Il est en effet plus aisé de se réorienter et de former un nouveau projet professionnel à partir d'une licence généraliste qu'avec un bac+4 spécialisé.

D'autant que pour les étudiants qui ne pourraient poursuivre leurs études en master universitaire, il existe de nombreuses formations ouvertes aux titulaires de bac+3. Certes, beaucoup sont dispensées par des établissements privés, mais elles peuvent souvent être suivies en alternance, que ce soit dans le numérique, la gestion, le management ou de nombreuses spécialités commerciales.

D'autre part, ces formations ne décernent pas le "diplôme national de master", mais souvent des titres professionnel de niveau 1 (bac+5) inscrits au Répertoire national des certifications professionnelles. Or ces titres professionnels sont très appréciés des entreprises et garantissent souvent une meilleure insertion qu'un master de l'université comportant peu de stages et d'expériences en entreprise. Des faits à prendre en compte au moment de bâtir un nouveau projet.




Rédigé par le Mercredi 23 Aout 2017
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