Réforme du bac : l'examen va être profondément transformé


Pierre Mathiot a remis le 24 janvier 2018 au ministre de l'Education le rapport présentant le fruit de la consultation sur la réforme du bac. L'examen serait profondément transformé pour mieux préparer à l'enseignement supérieur. On saura mi-février quelles propositions du rapport sont retenues.




Jean-Michel Blanquer (à g.) reçoit le rapport remis par Pierre Mathiot © MEN / Philippe Devernay
Il a rendu sa copie ! Ancien directeur de l'IEP Lille et professeur des universités, Pierre Mathiot a présenté officiellement le 24 janvier le rapport qui lui avait été commandé par le ministre de l'Education nationale en vue d'une réforme du baccalauréat qui devrait s'appliquer dès 2021.

Après des semaines de consultations des représentants des parents, des enseignants, des proviseurs et des lycéens, il dessine les contours assez précis de ce que pourrait être le nouveau bac : un examen comportant moins d'épreuves, intégrant 40% de contrôle continu, mais dont 75% des notes seraient prises en compte dans Parcoursup pour poursuivre des études supérieure.

C'est là l'esprit guidant toute la réforme : le baccalauréat ne doit pas seulement certifier la fin des études secondaires ; il doit mieux préparer à l'entrée et à la réussite dans le supérieur. Il doit être simplifié et retrouver du sens.

Les épreuves d'examen qui seraient conservées

Quelles seraient donc les épreuves conservées dans l'examen et sous quelle forme ?

- Les épreuves anticipées de français (écrit et oral) seraient conservées en fin de première. "Nous proposons que le poids du français dans le total du baccalauréat soit de 10% pour tous les candidats", indique le rapporteur.

- En terminale, les lycéens passeraient à la rentrée des vacances de Pâques deux épreuves "d'approfondissement disciplinaire". Il s'agirait des matières choisies par eux comme "majeures" en fonction de leur projet d'avenir. Ces notes seraient en effet prises en compte pour entrer dans l'enseignement supérieur.

Contrairement à la situation actuelle où tous les élèves d'une série passent les mêmes épreuves, chacun pourrait donc personnaliser son parcours au lycée et mieux se préparer ensuite à ses futures études. Ces deux épreuves compteraient pour 25% de la note finale et l'élève pourrait choisir d'affecter 10% des points à l'une et 15% à l'autre matière.

- En terminale, une épreuve écrite de philosophie serait proposée fin juin à tous les lycéens quel que soit leur parcours. Une façon de ne pas sacrifier l'emblématique épreuve de philo du bac sur l'autel de la réforme. La note compterait pour 10% du total pour tous les candidats.

- Fin juin également, tous les candidats passeraient un "Grand oral" sur un sujet pluridisciplinaire qu'ils auraient travaillé en groupe depuis la classe de première. Il s'agit là d'une épreuve nouvelle inspirée à la fois des TPE et de l'oral sur projet des séries technologiques. 

Durant 30 minutes, l'élève serait seul(e) face à trois enseignants dont un extérieur à l'établissement (et même non enseignant). "Il peut s'agir d'un commentaire comparé d'ouvrages, y compris en langues étrangères, d'une enquête sociologique, d'une expérience menée en laboratoire, de la production d'un objet".

Ce "Grand oral" devrait être lié à une des deux matières de majeure ainsi qu'à une autre discipline suivie par l'élève durant son cursus (Le rapport donne l'exemple d'un groupe d'élèves qui aurait  choisi les mathématiques parmi ses disciplines d'approfondissement et qui suivrait par ailleurs un enseignement complémentaire d'histoire-géographie : il pourrait travailler sur les enjeux du codage militaire pendant la Seconde Guerre mondiale).

​Le rapport de PIerre Mathiot propose que ce grand oral compte pour 15% de la note finale du bac. Seuls ce grand oral et l 'épreuve de philosophie ne pourraient pas être pris en compte dans Parcoursup.

Au total, les épreuves compteraient pour 60% de la note finale du bac.


La part du contrôle continu augmentée

Les 40% restants de la note finale du bac seraient donc pris en compte via le contrôle continu, c'est-à-dire les notes obtenues par le lycéen dans le "cycle terminal" qui regroupe la première et la terminale. Cela présenterait deux gros avantages : alléger la charge d'organisation du bac et inciter les élèves à s'investir dans leur travail dans la durée. C'est d'ailleurs ce qui a sans cesse été proposé par tous ceux qui envisagent de réformer le bac depuis dix ans.

Mais comment cela se ferait-il ? Par la simple prise en compte des notes des bulletins scolaires ? Ce serait le plus simple. Toutefois, cela présente l'inconvénient de supprimer l'anonymat de l'élève. D'autre part, cette option rompt un peu le principe républicain de l'égalité des élèves face à des sujets nationaux, les niveaux des lycées n'étant pas identiques.

C'est pourquoi Pierre Mathiot présente deux autres options pour prendre en compte les notes du lycéen au cours de l'année :

- Organiser en première et terminale des épreuves ponctuelles pour l'ensemble des enseignements suivis par les élèves, y compris ceux des épreuves anticipées et terminales, à l'exception du Grand oral. Ce serait un peu comme les bacs blancs actuels : les sujets seraient pris dans une banque de sujets, et les corrections faites par des professeurs de l'académie.

Ces épreuves pourraient être soit groupées sur une semaine, soit réparties dans l'année. L'inconvénient de cette formule est qu'il ne faudrait pas retrouver la complexité d'organisation du bac actuel et perdre dans l'année le temps gagné en juin.

- Ou bien, Pierre Mathiot imagine encore une formule mixte où l'on prendrait en compte  des épreuves ponctuelles ET, pour une part marginale, les moyennes des bulletins des classes de première et de terminale. Par exemple dans une répartition de 30 % pour les épreuves ponctuelles et 10% pour les bulletins dans le poids total du baccalauréat. 

C'est cette option qu'il préconise, pour diluer les défauts des autres options. Le rapporteur souligne toutefois qu'à l'heure actuelle, personne ne s'émeut du fait que les notes prises en compte par les formations sélectives (IUT, BTS, classes prépa) d'enseignement supérieur sont uniquement celles des bulletins scolaires : il n'y a ni anonymat, ni égalité. Mais une réforme en elle-même suscite toujours plus de critiques que ce qui est en place : c'est là toute la difficulté de réformer.

Remplacer les séries de bac par un choix de parcours à la carte ?

Très intéressant même s'il est moins médiatisé, le rapport de Pierre Mathiot propose de profiter de cette réforme du bac pour transformer l'organisation de l'enseignement dans les lycées généraux et technologiques.

Le bac actuel, dans sa forme et son contenu, conditionne en réalité tout l'enseignement de la seconde à la terminale : les programmes, l'enseignement des professeurs qui vise surtout à préparer à l'examen, l'emploi-du-temps. Il favorise le bachotage qui doit se faire en parallèle de la préparation de l'orientation, du passage éventuel de concours, etc.

La répartition en séries de bac, dans l'enseignement général et technologique, touche aussi ses limites : la suprématie du bac S nuit aux autres séries sans parvenir toutefois à former suffisamment de jeunes scientifiques. 

En cohérence avec sa réforme du bac, Pierre Mathiot propose donc :
- de supprimer les séries de bac, dans l'enseignement général et technologique, et de permettre aux lycéens de bâtir davantage leur parcours "à la carte" en faisant un choix entre des majeures, des mineures, et des mineures optionnelles. Des couples de majeures (par exemple "maths-physique" ou "SES-maths" ou "lettres et art") seraient toutefois proposés.

- Les élèves choisissant des majeures technologiques suivraient les mêmes enseignements dans les matières générales du type français, philo, anglais, afin de bénéficier de la même culture commune. Par contre, Pierre Mathiot souligne l'intérêt de conserver une pédagogie spécifique pour les matières souvent basées sur l'expérimentation.

- La durée des cours serait réduite à 45 minutes, l'année organisée en deux semestres (comme à l'université). Le temps au lycée comprendrait : des cours généraux communs à tous, des cours correspondant aux majeures choisies, sorte d'unité d'approfondissement, et des temps d'accompagnement où pourrait être fait le travail sur l'orientation, les travaux de groupe, la méthodologie...

Le choix des réformes retenues sera connu mi-février 2018

Tout ceci signifie bien sûr de réformer très profondément le lycée. Le rapport de Pierre Mathiot est désormais entre les mains du ministre de l'Education nationale Jean-Michel Blanquer à qui il appartient de décider quelles propositions il retient.

Il faudra donc attendre mi-février pour savoir exactement quel sera le visage du bac en 2021. Le temps presse car la réforme pourrait affecter les classes de seconde dès la rentrée 2018.

Téléchargez ci-dessous le rapport Mathiot 

bac_2021_rapport_Mathiot_884443.pdf  (2.51 Mo)




Rédigé par le Jeudi 25 Janvier 2018
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