Rentrée : les étudiants des grandes écoles mis au défi d'impacter le monde


Urgence climatique, dérives du numérique, sexisme... Dans leurs événements de rentrée, les grandes écoles confrontent d'emblée leurs étudiants aux grands défis du 21e siècle. Mais ceux-ci n'ont pas attendu les écoles pour s'engager.




Les étudiants du programme Grande école de Grenoble Ecole de Management découvrent le défi de la rentrée. © reussirmavie.net
Ce 13 septembre 2021, ils s'engouffrent en rangs serrés vers le grand atrium baigné de lumière de Grenoble école de management (GEM). S'ils n'étaient tous masqués, on verrait sans doute bien des sourires sur les visages de ces 700 nouveaux étudiants du programme grande école.

Après deux ans de classe prépa pour beaucoup et des mois de crise sanitaire, cette rentrée, sans jauge en présentiel, a pour eux une saveur particulière.
D'autant que depuis 4 ans, GEM aime surprendre ses étudiants par un "défi de rentrée" innovant. Comme ce piège à la Black Mirror monté en 2019 pour les sensibiliser à l'utilisation de leurs données.

Le grand écran s'éclaire et les embarque dans un univers futuriste format BD :
"Ici la station spatiale Tianzhu. Sous le contrôle de Tianzhu Entreprise, notre civilisation s'est laissée envahir par un usage du numérique à outrance. Un groupe est entré en résistance mais nous appelons les Terriens à l'aide !".

GEM met le cap sur le "numérique raisonné"

"Pour moi qui viens de la fac, c'est tellement nouveau, dit Jorge, qui a intégré l'école après une licence de maths via le concours Passerelle. Dans cette histoire de science-fiction, le monde est en ruines et j'aime l'idée d'être un manager de demain".

De fait, durant dix jours, les étudiants répartis en équipes tentent de résister à "la société consumériste et techniciste de Tianzhu". La sortie de la "smartfiction" se fait en groupe-classe, autour d'un enseignant, via un exercice de respiration-méditation.

Et c'est le retour sur Terre ! Jusqu'à la fin septembre, chaque groupe se penche sur l'usage problématique d'un objet connecté : drone de livraison, pacemaker intelligent, compteurs connectés, parcours client digitalisé... Il s'immerge, explore, puis imagine une action en faveur d'un "numérique raisonné".

Quand une école de management devient "société à mission"

Avec un tel sujet, l'école grenobloise, experte en management de la technologie depuis sa fondation dans les années 80, est bien fidèle à son ADN. Mais GEM est aussi la première business-school française à s'est déclarée en 2021 "société à mission" : il s'agit désormais de former des talents pour un futur technologique durable.

"L'événement doit donner envie aux étudiants d'impacter durablement et positivement le monde dans lequel ils vivent", explique Lionel Strub, enseignant responsable du Défi de la rentrée 2021 à GEM.
Les incontournables tote bags déclinent le slogan de la grande école.

L'expérience est aussi formatrice, et d'ailleurs, GEM a conçu son "défi de rentée" comme un cours. Innovant, décalé, expérientiel.  Non seulement, l'expérience casse la glace et soude la promotion, mais les étudiants apprennent beaucoup de choses sur l'internet des objets, les réseaux sociaux, la gestion des données, la  sécurité informatique, le marketing digital...

Ils acquièrent aussi des savoir-faire nouveaux car chaque équipe doit aboutir à la réalisation d'un podcast, une infographie et un mini-site internet pour entrer dans une posture "d'influenceur". L'innovation est donc aussi pédagogique.

L'atelier sur la Fresque du climat encore très utilisé

Est-ce l'effet de la crise sanitaire et des autres crises - économiques, climatiques, migratoires - qui fragilisent tant le monde actuel ? A la rentrée 2021, les grandes écoles ont souvent mobilisé leurs étudiants sur des enjeux de société. 

La transition écologique en premier lieu, mais aussi les questions d'inclusion, de diversité, d'égalité.

Quant à la méthode, au-delà des classiques conférences ou "leçons inaugurales", les écoles proposent de plus en plus de jeux sérieux et autres ateliers collaboratifs permettant aux étudiants d'être acteurs et d'apprendre en expérimentant.

Ainsi à l'Estaca, école d'ingénieurs postbac spécialisée dans les transports, mais aussi à l'Edhec ou Audencia, étudiants ou membres du personnel ont pu participer à la Fresque du climat

Monté par une association depuis 2019 et basé sur un jeu de cartes géant, ce bel atelier scientifique propose à des groupes de 7 participants de mieux comprendre le dérèglement climatique et ce qui pourrait le freiner.


Et aussi des ateliers sur la prévention du sexisme

Quelques écoles ont aussi choisi des activités de rentrée autour du sexisme et des discriminations en fonction du genre.

A l'Estaca, école d'ingénieurs postbac où les étudiantes sont encore minoritaires, les 450 nouveaux élèves accueillis à Paris Saclay et à Laval ont pu réagir à des scénettes jouées par les étudiants des niveaux supérieurs.

Même démarche à l'Edhec, où les étudiants et étudiantes ont pu participé fin août à un jeu pédagogique développé par la Chaire Open Leadership for Diversity & Inclusion intitulé "Violences Sexistes et Sexuelles : Agir et en Finir !"

Répartis en groupes et encadrés par 60 coaches, ils ont appris, selon la grande école, à "identifier les situations à risque et leurs implications juridiques, à développer les bons réflexes ou encore à adopter la meilleure attitude pour venir en aide aux victimes".

Les associations étudiantes, autre lieu d'engagement fort en grande école

Reste ensuite à intégrer tous ces sujets dans les formations, ce que les grandes écoles tentent de faire plus ou moins rapidement, souvent sous la pression de leurs propres étudiants. Peu à peu cependant, la "responsabilité sociétale des entreprises" (RSE) ou l'entrepreneuriat social occupent une place croissante dans les cursus.

Mais en cette rentrée 2021, beaucoup d'étudiants attendent surtout la reprise de la vie associative, très ralentie par les confinements et les cours à distance, pour agir concrètement pour les causes qui leur tiennent à coeur.

Impact, association étudiante créatrice de solutions durables à GEM

L'équipe de Impact GEM, association étudiante de Grenoble école de management.
Exemple à Grenoble Ecole de management avec l'association Impact, où 90 étudiants déploient une impressionnante série d'actions pour créer "des solutions durables" : ateliers de sensibilisation aux enjeux climatiques, organisation d'événements selon les normes éco-responsables, aide à l'insertion professionnelle de réfugiés, accompagnement de micro-entrepreneurs, distribution de paniers du terroir, actions de recyclage, forum de recrutement pour l'économie sociale et solidaire...

Les jeunes membres de l'association  proposent même des missions d'audit RSE à des entreprises, et collaborent avec la direction de l'école pour guider sa stratégie de "responsabilité sociétale" !

On est loin de l'image d'une élite étudiante coupée du "vrai monde" et uniquement occupée à faire la fête.



Rédigé par le Mercredi 15 Septembre 2021
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