Anonymous et les internautes contre-attaquent après la fermeture de Megaupload


Après la fermeture du site de téléchargement Megaupload par le gouvernement américain et plusieurs projets de loi voulant interdire la contre-façon, les grands acteurs d'Internet protestent. Et les pirates du groupe Anonymous multiplient les attaques. En cause, la liberté d'Internet.




Manifestion des Anonymous / Wikipedia, Vincent Diamante
Tout commence le jeudi 19 janvier 2012, quand la police fédérale américaine fait fermer la plateforme Megaupload, vrai mastodonte du téléchargement illégal. Une opération musclée puisque le FBI ne se contente pas de baisser le rideau du site et de ses 17 noms de domaine : il saisit 50 millions de dollars sur les comptes de la société à Hong Kong, et fait arrêter sept de ses dirigeants et salariés dont le fondateur, Kim Schmitz, dit "Kim Dotcom", appréhendé en Nouvelle-Zélande.

Aux Etats-Unis, le fait n'est pas nouveau : depuis fin 2010, plus de 350 sites ont déjà été "saisis" par les autorités qui ont décidé de faire le ménage du web. Nom de code : "Operation In Our Sites", un jeu de mots qui signifie aussi  "dans notre ligne de tir". Parmi les cibles, le site NinjaVideo.net, dont le dirigeant a été condamné à 14 mois de prison.

Au pays d'Hollywood, on ne rigole pas avec la propriété intellectuelle. Deux projets de lois sont d'ailleurs en préparation : le Sopa (Stop Online Piracy Act) et Pipa (Protect Intellectual Property Act. Ils devaient obliger les fournisseurs d'accès et les émetteurs de cartes de paiement  à exclure les "sites suspects" mais voilà : la réaction des acteurs du Net a été si violente, que le débat, prévu pour le 24 janvier 2012 au Sénat américain, a dû être repoussé...

Les géants de l'Internet font plier l'Amérique

Dès l'annonce de la saisie de Megaupload, des manifestants ont protesté, à New York, contre ces projets de lois qui selon eux menacent la liberté de l'accès au web. Le géant Google a fait circuler une pétition signée par 7 millions d'internautes. Mark Zuckerberg, le fondateur et patron de Facebook, n'a pas mâché ses mots non plus. Des dizaines de petits sites ont publié des protestations.
Même le sage Wikipédia a dit son opposition en fermant durant 24 heures l'accès à ses informations, craignant que les nouvelles lois n'imposent "un monde sans libre savoir".

Du coup les associations d'artistes, les studios de cinéma et les maisons de disque se sont retrouvées sacrément isolées. Et les projets de loi Sopa et Pipa ont été repoussés à date ultérieure. Les géants du web ont eu raison, en tout cas pour l'instant, des projets de l'Oncle Sam.

En France, le candidat à la présidentielle François Hollande en a profité pour annoncer que s'il était élu, il abolirait la loi Hadopi qui sanctionne les internautes et trouverait d'autres moyens pour protéger les créateurs en faisant participer tous les acteurs de l'économie numérique au financement de la création. On se souvient en effet de la vive polémique qui avait entouré, en France, le vote de cette loi instituant une Haute autorité pour punir les téléchargements illégaux.

Les hackers du groupe Anonymous en première ligne

D'autres adversaires se sont dressés face aux gendarmes du web. Ceux-là sont vraiment des pirates et le revendiquent : Anonymous, un réseau de spécialistes du raid informatique, est en première ligne pour prôner la liberté de l'internet.

Dès le blocage de Megaupload, les hackers attaquent et mettent hors service le site du gouvernement américain, celui du ministère de la Justice, et du géant Universal Music. Le lendemain, le président français Nicolas Sarkozy s'étant félicité de l'arrêt de Megaupload, c'est le site de l'Elysée qui est piraté durant quelques minutes et bien sûr celui d'Hadopi. Egalement le site de l'Express, dont le directeur Christophe Barbier a traité les Anonymous de "voleurs".

La cyber-attaque a aussi touché  le site de la chanteuse brésilienne Paula Fernandes, avec sur sa page d'accueil un message en anglais disant : "Si Megaupload est hors service, toi aussi tu l'es !", signé "GhostOffThreads", sous l'image d'un Joker en noir et blanc.

La cyberguerre est-elle déclarée ? En tout cas c'est la menace agitée dans sa vidéo par Anonymous.


Droit des Internautes contre droits auteurs : l'impossible équilibre ?

Une autre offensive s'est déclenchée sur le web contre un traité multilatéral préparé par plusieurs Etats : le traité anti-contrefaçon ACTA (Anti-contrefeiting trade agreement) veut punir la contrefaçon et protéger la propriété intellectuelle. Le gouvernement polonais s'apprêtant à le signer le 26 janvier, une centaine de sites internet polonais affichaient en signe de protestation des pages noires le 24 janvier.

En même temps, la page facebook d'une marche silencieuse organisée par le mouvement "Stop ACTA" recueillait 38445 mentions "J'aime".

 L'Union européenne "ne bloquera jamais internet" pour faire respecter le droit d'auteur au mépris du respect de la liberté des internautes, a déclaré le 22 janvier 2012 la commissaire européenne chargée de la Justice, Viviane Reding lors de la conférence DLD, réunissant à Munich le gratin de l'internet mondial.. "La protection des créateurs ne doit jamais être utilisée comme un prétexte face à la liberté de l'internet", a-t-elle précisé.

"Jamais vous n'aurez de la part de l'Europe un blocage d'internet, ce n'est pas l'option (choisie par) l'Europe", a déclaré Mme Reding  "La liberté d'information est un droit fondamental directement lié à la liberté d'internet", a justifié la commissaire européenne, ajoutant que "la politique européenne a pour but d'équilibrer le respect des droits" d'auteurs et de ceux des internautes.
Un équilibre décidément difficile à trouver.

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Rédigé par le Mardi 24 Janvier 2012
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